Piquer : verbe (mot venant du latin populaire pikkare, d’un radical onomatopéique pikk– exprimant le bruit d’un coup sec porté par un objet pointu).
Le verbe « piquer » a de nombreuses acceptions :
I) Verbe transitif :
A. Percer avec une pointe :
1. Entamer légèrement ou percer avec une pointe.
– Citation de l’auteur dramatique, romancier et librettiste français Francis Wiener de Croisset, né Edgar Franz Wiener (1877-1937) :« Un bouvier armé d’un aiguillon, pique ses deux bœufs bossus » (aiguillonner).
– Citation de l’écrivain français Guy de Maupassant (1850-1893) : « Il piqua son cheval et s’élança » (éperonner).
Piquer des deux (éperons) : éperonner vivement son cheval ; partir au galop.
Faire une piqûre à (quelqu’un).
– Citation de l’écrivaine, traductrice, directrice littéraire Élisabeth Gille (1937-1996) :« Dites-donc, vous commencez à avoir des hématomes partout, je me demande où je vais vous piquer ».
Familier : On l’a piqué contre le tétanos, on l’a vacciné.
Il a dû faire piquer son vieux chien, lui faire faire une piqûre entraînant la mort (euthanasier).
Percer en enfonçant un dard, un stylet, un crochet à venin.
Être piqué par un moustique.
Se faire piquer par une guêpe.
Quelle mouche l’a piqué ?
2. Complément chose : Percer pour prendre, pour attraper.
Piquer sa viande avec sa fourchette.
Piquer des olives.
– Citation de l’écrivain français Guy de Maupassant (1850-1893) : « Pierre mangeait des flageolets et les piquait un à un avec une pointe de sa fourchette ».
Cuisine : Percer de trous pour garnir, pour larder, ailler.
Piquer un oignon avec un clou de girofle.
Un gigot d’agneau piqué d’ail (aillé).
Fixer en traversant avec une pointe, une aiguille.
Piquer une photo au mur (punaiser ; pin-up).
Piquer des papillons (épingler).
Coudre à la machine.
Bâtir une robe avant de la piquer.
Technique : Percer de petits trous selon un dessin.
Piquer des cartes pour métiers à tisser.
Par extension : Piquer un dessin, le marquer par de petits trous.
3. Parsemer de petits trous (trouer).
Les vers, les insectes ont piqué ce meuble.
Meuble ancien piqué des vers (vermoulu ; région : cussonné).
Locution familière : N’être pas piqué des hannetons, des vers : être remarquable en son genre.
– Citation du poète et romancier français Louis Aragon (1897-1882) : « Un petit froid qui n’est pas piqué des hannetons ».
(Surtout participe passé) Semer de points, de petites taches (moucheter, piqueter, tacheter).
– Citation de l’écrivain et poète français Victor Hugo (1802-1885) : « Les mains toutes piquées de taches de rousseur ».
Locution familière : Se piquer le nez, la ruche : s’enivrer.
– Citation de l’écrivain, réalisateur, scénariste et dialoguiste français Jean Herman, dit Jean Vautrin (1933-2015) : « Il se piquerait la ruche avec un rien de clos de Gamot – le meilleur des vins de Cahors ».
4. Frapper vivement.
– Citation de l’écrivain et poète français, membre de l’Académie française Maurice Genevoix (1890-1980) : « Le mulet, piquant le sable de durs coups de sabot ».
Au billard, piquer la bille, la frapper en tenant la queue presque verticalement.
Musique : Piquer une note, la marquer en la détachant.
Piquer une cloche, la frapper avec son battant d’un seul côté (opposé à sonner à toute volée) pour sonner l’heure (ou piquer l’heure).
Maritime : Citation de l’ écrivain et officier de marine français Claude Farrère, nom de plume de Frédéric Charles Pierre Édouard Bargone (1876-1957) : « La cloche du vaisseau-amiral piqua deux coups doubles ».
5. Donner la sensation d’entamer avec une pointe (brûler, cuire, picoter).
Les orties lui ont piqué les jambes.
Jaloux pour ses poules, le coq m’a piqué les cuisses.
Le froid pique les joues (pincer).
La fumée pique les yeux (irriter).
Les orties piquent les jambes nues.
Plat épicé qui pique la langue (brûler, emporter).
Familier : Ça pique.
Une barbe qui pique, dure au contact.
Familier : Enfants : De l’eau qui pique : de l’eau gazeuse, pétillante.
Sens figuré : Piquer (les yeux) : être désagréable, provoquer un sentiment négatif.
Une tenue qui pique les yeux.
Des fautes d’orthographe qui piquent.
Se lever à quatre heures du matin, ça pique !
6. Sens figuré et vieilli : Blesser, irriter vivement (agacer, froisser, vexer).
– Citation du dramaturge et comédien français Molière (1622-1673) : « Je fus piqué de la froideur avec laquelle il m’en parlait ».
Sens moderne : piquer au vif : irriter l’amour-propre de.
Cette remarque ironique l’a piquée au vif.
(Complément abstrait) Faire une vive impression sur (éveiller, exciter).
– Citation de de l’écrivain français Honoré de Balzac (1799-1850) : « Rastignac voulait piquer ma curiosité ».
– Citation du philosophe et historien français, membre de l’Académie française Hippolyte Taine (1828-1893) : « Ils n’ont pas besoin d’effets violents et imprévus qui piquent leur attention ».
7. Familier : Prendre, voler (chiper, faucher).
On lui a piqué toutes ses affaires.
Se faire piquer ses idées (piller, pomper).
– Citation de l’écrivain français Robert Merle (1908-2004) :« Je les ai déjà vus qui piquaient des alliances en douce aux macabs ».
Arrêter, pincer (quelqu’un).
La police l’a piqué à la sortie du métro.
8. Familier : Prendre, faire, avoir brusquement.
Piquer un galop, un cent mètres.
– Citation du poète, critique littéraire, conteur, chroniqueur et romancier français Charles-Louis Philippe (1874-1909) : « Il plongea la tête comme on pique un plongeon ».
Piquer un somme, un roupillon (faire).
Piquer une colère, une crise.
Piquer sa crise : se mettre en colère.
Piquer un fard, un soleil : rougir brusquement.
B. Enfoncer par la pointe
Piquer des épingles dans une pelote.
Piquer une tête : se jeter la tête la première.
Piquer une tête dans l’eau : plonger.
Piquer une embardée
– Citation du poète français Charles Baudelaire (1821-1867) : « Lui fit piquer une tête contre la porte ».
II) Verbe intransitif :
1. Sens vieilli : S’élancer à cheval.
S’élancer rapidement, directement.
– Citation du poète français Charles Baudelaire (1821-1867) : « Nos deux ivrognes piquèrent tête baissée dans la porte, l’enfoncèrent ».
2 .Tomber, descendre brusquement.
Hirondelles qui piquent vers le sol.
Sans complément : Un avion qui pique, qui descend en piqué.
Locution : Piquer du nez : tomber le nez en avant.
– Citation de l’écrivain et philosophe français Jean-Paul Sartre (1905-1980) : « Il piqua du nez et s’abattit sur les marches ».
Le navire piquait de l’avant.
III) Verbe pronominal ; Se piquer
1. Être légèrement blessé, entamé par une pointe, un piquant.
Elle s’est piquée avec une aiguille.
Proverbe : Qui s’y frotte s’y pique : qui se risque à attaquer, à se mesurer à (quelqu’un) en subit les conséquences.
Se faire une piqûre, et spécialement : S’injecter un stupéfiant (anglicisme : se shooter).
Au Canada : piquerie, lieu d’accueil où les toxicomanes peuvent venir s’injecter leur dose.
– Citation d’Alexandre Vialatte, écrivain français (1901-1971) : « Elle va se piquer à la morphine, à l’héroïne et avec plusieurs autres drogues dans une espèce d’arrière-boutique assez sordide ».
2 Se couvrir de petites taches, de moisissures.
Les livres exposés à l’humidité se piquent.
Vin qui se pique, s’aigrit.
3. Sens figuré (Littérature) : Se froisser, se vexer (se formaliser).
Se piquer au jeu.
Se piquer de (quelque chose) : Prétendre avoir et mettre son point d’honneur à posséder (une qualité, un avantage) (se prévaloir)
Elle se pique d’art contemporain.
Avec un infinitif : Avoir la prétention de, se targuer, se vanter de.
– Citation de l’écrivain et éditeur français Richard Millet (né en 1953) : « À mon retour de vacances, je me piquais d’être musicien et composais de médiocres romances ».